Gare de Milan. La signora Parondi descend du train avec quatre de ses fils (Simone, Rocco, Ciro et Luca) et se rend chez le cinquième, l'aîné, Vincenzo. Elle a quitté le Sud misérable de l'Italie après la mort de son mari pour refaire sa vie au Nord, espérant une meilleure vie pour ses fils. Pour un temps seulement ses rêves semblent être en voie de se réaliser...
Que ce film est dense! Il faut un bon moment pour absorber tout ce qu'il nous donne.
Vincenzo est le romantique, Simone la brute primitive, Ciro le droit, Luca l'innocent - Rocco (Alain Delon) semble être à la fois l'antithèse de Simone et un mélange des trois autres frères. Une figure totalement sacrificielle et inféodée à sa mère (elle-même figure du sacrifice et de la souffrance), totalement christique donc. Hystériquement christique si on ose dire, tant les débordements émotionnels, les délires meurtriers, les renoncements amoureux sont emportés, criés dans l'exagération méridionale, si bien que jamais les paroles d'apaisement n'ont la moindre chance de porter - pour ainsi dire étouffées dans ce brouhaha paroxystique. À se demander, presque, si l'apaisement est le but que poursuit Rocco chaque fois qu'il tente de sauver Simone de lui-même, et si l'apaisement peut vraiment être trouvé au bout de tant d'humiliations.
Car la tragédie qui se déroule est celle d'un peuple - celui de l'Italie du Sud - humilié par ses riches voisins, forcé de quémander des miettes pour survivre, celle d'une famille humiliée d'aspirer si fort à s'extraire de sa misère et d'être pour cela traitée comme des moins que rien (on le voit dès le début dans la réception que lui fait la famille de la fiancée de Vincenzo, et dans les sifflets qui accompagnent les combats de boxe de Simone).
C'est encore l'humiliation (funeste) de Simone devant Rocco, qui d'abord semble un peu simplet mais se révèle être le plus fort, le plus vertueux, qui bientôt gagne l'amour de Nadia (Annie Girardot la campe magnifiquement en figure insolente dans son malheur) une fille légère qui a eu le culot d'éconduire Simone. Rocco qui devient à son tour boxeur, incroyablement populaire lui, et qui atteint un niveau auquel jamais son aîné n'a pu prétendre. Rocco dont la perfection et le succès en tout ne font qu'enfoncer davantage son frère si peu capable, déjà, de résister aux tentations de ce pays d'abondance et de corruption. Et l'incapacité de Rocco à voir le mal qui ronge le cœur de Simone agit comme un acide sur ce dernier, tout comme d'ailleurs l'amour irraisonné de sa mère - la confiance et les espérances de nos proches sont si lourdes à porter lorsqu'on se sent uniquement capables de les décevoir...
En définitive les sacrifices auront été inutiles: une fois les vies saccagées, la famille brisée et l'intégration compromise, il ne restera qu'à attendre de pouvoir revenir un jour à la terre natale, là-bas dans le Sud.
Que ce film est dense! Il faut un bon moment pour absorber tout ce qu'il nous donne.
Vincenzo est le romantique, Simone la brute primitive, Ciro le droit, Luca l'innocent - Rocco (Alain Delon) semble être à la fois l'antithèse de Simone et un mélange des trois autres frères. Une figure totalement sacrificielle et inféodée à sa mère (elle-même figure du sacrifice et de la souffrance), totalement christique donc. Hystériquement christique si on ose dire, tant les débordements émotionnels, les délires meurtriers, les renoncements amoureux sont emportés, criés dans l'exagération méridionale, si bien que jamais les paroles d'apaisement n'ont la moindre chance de porter - pour ainsi dire étouffées dans ce brouhaha paroxystique. À se demander, presque, si l'apaisement est le but que poursuit Rocco chaque fois qu'il tente de sauver Simone de lui-même, et si l'apaisement peut vraiment être trouvé au bout de tant d'humiliations.
Car la tragédie qui se déroule est celle d'un peuple - celui de l'Italie du Sud - humilié par ses riches voisins, forcé de quémander des miettes pour survivre, celle d'une famille humiliée d'aspirer si fort à s'extraire de sa misère et d'être pour cela traitée comme des moins que rien (on le voit dès le début dans la réception que lui fait la famille de la fiancée de Vincenzo, et dans les sifflets qui accompagnent les combats de boxe de Simone).
C'est encore l'humiliation (funeste) de Simone devant Rocco, qui d'abord semble un peu simplet mais se révèle être le plus fort, le plus vertueux, qui bientôt gagne l'amour de Nadia (Annie Girardot la campe magnifiquement en figure insolente dans son malheur) une fille légère qui a eu le culot d'éconduire Simone. Rocco qui devient à son tour boxeur, incroyablement populaire lui, et qui atteint un niveau auquel jamais son aîné n'a pu prétendre. Rocco dont la perfection et le succès en tout ne font qu'enfoncer davantage son frère si peu capable, déjà, de résister aux tentations de ce pays d'abondance et de corruption. Et l'incapacité de Rocco à voir le mal qui ronge le cœur de Simone agit comme un acide sur ce dernier, tout comme d'ailleurs l'amour irraisonné de sa mère - la confiance et les espérances de nos proches sont si lourdes à porter lorsqu'on se sent uniquement capables de les décevoir...
En définitive les sacrifices auront été inutiles: une fois les vies saccagées, la famille brisée et l'intégration compromise, il ne restera qu'à attendre de pouvoir revenir un jour à la terre natale, là-bas dans le Sud.