dimanche 6 septembre 2009

Walkabout - Nicolas Roeg, 1971

Sydney, Nouvelles Galles du Sud, Australie. Un homme emmène ses deux enfants en pique-nique dans le bush. Étrange idée, à l'issue plus étrange encore: l'homme, pris de folie, sort un pistolet et commence à tirer sur les enfants, puis arrose la voiture d'essence et se suicide. Les enfants (Jenny Agutter et Luc Roeg) n'ont d'autre choix que de tenter de retrouver le chemin vers la civilisation. Leurs errances leur font rencontrer un jeune Aborigène (David Gulpilil) parti en walkabout...



Il n'y a pas de mots pour décrire le dépaysement qui vous saisit lorsque, venant d'Europe, vous arrivez en Australie pour la première fois. Le choc est d'une violence inouïe, rien qui soit familier à l'oreille, à l'œil ou même à l'odorat, jusqu'à la consistance de l'air qui vous parait insolite.
Rien ne peut vous y préparer, et de fait les enfants du film ne sont absolument pas armés pour faire face à la dureté extrême de ce que ce pays a de plus hostile: son désert, sa chaleur, sa faune bizarre, féroce et venimeuse. Le contraste entre les uniformes de sages écoliers anglais et la minéralité quasiment intouchée de l'environnement est à lui seul un commentaire acerbe sur l'inadéquation de l'homme et de sa civilisation rigide face à la sauvagerie de cette réalité-là (le fait que les enfants se cramponne à une radio qui leur débite des conseils sur les bonnes manières à table est une autre critique en ce sens). Les enfants ne peuvent pas survivre, et n'auraient pas dû survivre (incapables de trouver seuls l'eau pourtant toute proche, inaptes à exploiter la nature chichement nourricière) s'ils n'avaient pas croisé le jeune "Abo".



Celui-ci, au contraire, est infiniment adapté à ce pays, rien ne l'inquiète et il n'est que sourires et jeux. La chasse assouvit les besoins du jour, il peint sur les parois rocheuses un hommage aux esprits bienveillants. Il vit dans une bienheureuse immunité et ne cherche qu'à la partager avec ces deux enfants perdus, rêvant même à la possibilité d'une vie de famille avec la jeune fille blanche dans une ferme abandonnée. Mais l'incompréhension fondamentale vient fracasser l'illusion de l'harmonie, laissant la jeune femme changée à jamais. Roeg nous laisse sur une saveur évanouie, regrettée quoique jamais sa composition n'ait été totalement connue, un constat sur deux mondes non miscibles.

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